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Mike Kelley, "Ghost and Spirit" : L’expo à ne pas ghoster !

  La Bourse de Commerce ouvre les portes de « Ghost and Spiri», la nouvelle exposition temporaire sur l’artiste américain décalé, Mike Kelley, du 13 octobre 2023 au 19 février 2024. Elle suit un axe chronologique en occupant tout le deuxième étage circulaire ainsi que la Rotonde et l’auditorium.

La Bourse de Commerce ouvre les portes de « Ghost and Spiri», la nouvelle exposition temporaire sur l’artiste américain décalé, Mike Kelley, du 13 octobre 2023 au 19 février 2024. Elle suit un axe chronologique en occupant tout le deuxième étage circulaire ainsi que la Rotonde et l’auditorium.

  Mike Kelley (1954-2012), issu de la classe populaire américaine, renouvelle les codes artistiques de son époque en s’inspirant largement de la culture de masse : B. D., décorations kitsch, soap opera, rituels lycéens, etc, pour créer une esthétique de la déconstruction, du dérangeant, jusqu’à la « victimisation », portée par une altérité moderne tripartite : folie, sexe et animalité. Il se distingue ainsi des courants institutionnels prédominants des années 1960, l’art conceptuel et le minimalisme, en réinjectant l’image, et même sa profusion, au coeur d’un acte créatif protéiforme : textes, objets, vidéos, photographies… Mike Kelley use de tous les supports qui croisent son passage comme message, ce qui amène à un vrai questionnement sur les limites de l’art tant d’un point de vue définitionnel que conservatif.

Mike Kelley (1954-2012), issu de la classe populaire américaine, renouvelle les codes artistiques de son époque en s’inspirant largement de la culture de masse : B. D., décorations kitsch, soap opera, rituels lycéens, etc, pour créer une esthétique de la déconstruction, du dérangeant, jusqu’à la « victimisation », portée par une altérité moderne tripartite : folie, sexe et animalité. Il se distingue ainsi des courants institutionnels prédominants des années 1960, l’art conceptuel et le minimalisme, en réinjectant l’image, et même sa profusion, au coeur d’un acte créatif protéiforme : textes, objets, vidéos, photographies… Mike Kelley use de tous les supports qui croisent son passage comme message, ce qui amène à un vrai questionnement sur les limites de l’art tant d’un point de vue définitionnel que conservatif.

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  Comment donc donner sens à des objets aux performances éteintes ou à ce qui serait confondu à une accumulation de bric-à-brac ? Ce fut le défi des membres organisateurs de la Tate Modern de Londres en collaboration avec le commissariat de la Bourse de Commerce. Le spectateur de « Ghost and Spirit » progressera dans l’œuvre de Mike Kelley en suivant un parcours linéaire chronologique. Ce choix de présentation moderniste se prête à l’œuvre de l’artiste, en s’appuyant sur une vision diachronique pour en dégager les thématiques phares réparties dans les salles (« Monkey Island », « The Poltergeist », « Half a Man »…). Ainsi conçu, chaque espace suffisamment grand dégage un univers différent de Mike Kelley en accueillant un bon nombre de pièces représentatives aux contours multiples : l’installation au sol de la Monkey Island, les Performance Related Objects sur une estrade en bois, le costume du Banana Man, sans compter la projection intégrale de plusieurs vidéos en salle, ainsi que celle de l’auditorium au sous-sol. Le spectateur, qui en a pour son information, sort donc de l’exposition content et satisfait.

Comment donc donner sens à des objets aux performances éteintes ou à ce qui serait confondu à une accumulation de bric-à-brac ? Ce fut le défi des membres organisateurs de la Tate Modern de Londres en collaboration avec le commissariat de la Bourse de Commerce. Le spectateur de « Ghost and Spirit » progressera dans l’œuvre de Mike Kelley en suivant un parcours linéaire chronologique. Ce choix de présentation moderniste se prête à l’œuvre de l’artiste, en s’appuyant sur une vision diachronique pour en dégager les thématiques phares réparties dans les salles (« Monkey Island », « The Poltergeist », « Half a Man »…). Ainsi conçu, chaque espace suffisamment grand dégage un univers différent de Mike Kelley en accueillant un bon nombre de pièces représentatives aux contours multiples : l’installation au sol de la Monkey Island, les Performance Related Objects sur une estrade en bois, le costume du Banana Man, sans compter la projection intégrale de plusieurs vidéos en salle, ainsi que celle de l’auditorium au sous-sol. Le spectateur, qui en a pour son information, sort donc de l’exposition content et satisfait.

  Néanmoins, certaines interrogations restent en suspens, notamment concernant les enjeux profonds sur l’art que l’exposition paraît esquiver. En effet, si le fascicule distribué à l’entrée évoque une redéfinition des frontières de l’art, l’exposition ne fournit pas de repères historiques, de points de comparaison suffisants, pour cerner et situer son ampleur au sein de l’histoire, plus générale, de l’art. Ces questions demeurent donc floues ainsi que le titre choisi de « Ghost and Spirit ». On nous explique qu’il fait référence à un script (accroché sous verre) d’une performance non réalisée, mais dont le sens interprétatif est survolé. S’agirait-il, en fait, des « réapparitions fantomatiques des paradigmes picturaux et sculpturaux disparus […] que l’art conceptuel se glorifiait d’avoir renversé » ?[1] La vision personnelle et subjective de la collection semble quelque peu en arrière-plan et mériterait une problématique plus claire.

  Cependant, l’installation des Kandors Full Set de la Rotonde mettra tout le monde d’accord. Dans ce laboratoire bédéesque, noir intersidéral, villes luisantes et rafales cosmiques emportent le visiteur dans les tréfonds de l’angoissante Kandor, où la solitude, l’oubli et la mort semblent être à demeure. Fascinante par la complexité de sa fabrication, les matériaux choisis et sa nature performative, cette œuvre, comme la ville qu’elle représente, dépasse toute frontière, temps, espace, époque, et l’une des réussites de cette exposition est d’avoir su lui insuffler un nouveau souffle de vie pour encore perdurer.

  Néanmoins, certaines interrogations restent en suspens, notamment concernant les enjeux profonds sur l’art que l’exposition paraît esquiver. En effet, si le fascicule distribué à l’entrée évoque une redéfinition des frontières de l’art, l’exposition ne fournit pas de repères historiques, de points de comparaison suffisants, pour cerner et situer son ampleur au sein de l’histoire, plus générale, de l’art. Ces questions demeurent donc floues ainsi que le titre choisi de « Ghost and Spirit ». On nous explique qu’il fait référence à un script (accroché sous verre) d’une performance non réalisée, mais dont le sens interprétatif est survolé. S’agirait-il, en fait, des « réapparitions fantomatiques des paradigmes picturaux et sculpturaux disparus […] que l’art conceptuel se glorifiait d’avoir renversé » ?[1] La vision personnelle et subjective de la collection semble quelque peu en arrière-plan et mériterait une problématique plus claire.

Cependant, l’installation des Kandors Full Set de la Rotonde mettra tout le monde d’accord. Dans ce laboratoire bédéesque, noir intersidéral, villes luisantes et rafales cosmiques emportent le visiteur dans les tréfonds de l’angoissante Kandor, où la solitude, l’oubli et la mort semblent être à demeure. Fascinante par la complexité de sa fabrication, les matériaux choisis et sa nature performative, cette œuvre, comme la ville qu’elle représente, dépasse toute frontière, temps, espace, époque, et l’une des réussites de cette exposition est d’avoir su lui insuffler un nouveau souffle de vie pour encore perdurer.

[1] Voir Benjamin H. D. Buchloh, « De l’esthétique d’administration à la critique institutionnelle », L’Art conceptuel, une perspective, 1989-1990, Paris, MAMVP, p.25

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