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« Bronzette en Seine »
Couverture PointeMag Mai 2025 - PointeMag, Enzo, "Bronzette en Seine"

Crédits photos © Jimmy Concy

L’opéra glaçant d’un viol : l’enregistrement d’Adriana Mater sort enfin chez Deutsche Grammophon

C’est en mars 2006 que la plus grande compositrice de son temps, Kaija Saariaho, achève son deuxième opéra, Adriana Mater, où les notes lourdes de tragédie transforment la souffrance d’un viol en un chant lyrique empreint de puissance et de féminisme. Nous l’attendions depuis longtemps cet enregistrement récompensé d’un Grammy Award en ce début d’année 2025, prix malheureusement posthume de l’artiste finlandaise, qui a tragiquement succombé à son cancer deux ans plus tôt. L’album est sorti le 18 avril 2025 chez Deutsche Grammophon. Les Orchestre et Choeur Symphoniques de San Francisco sont conduits le chef accoutumé à Saariaho, Esa-Pekka Salonen.

  Parisienne depuis 1982, après avoir étudié à la prestigieuse Académie Sibelius d’Helsinki, Saariaho s’inscrit à l’IRCAM pour perfectionner ses connaissances en acoustique et traitements électroniques du son. Fidèle à sa vision musicale aux tendances spectrales, Adriana Mater s’écoule en un flux sonore dont les flots turbulents font rebondir les gouttes de la complexité microtonale. 

  L’ouverture sur les percussions, qui scandent le mauvais augure du deuxième tableau, emporte l’auditeur sur les vagues du chaos de la guerre et préfigure le crime du viol par le soldat Tsargo. Dans un onirisme poreux entre réel cauchemardesque et mauvais rêve, l’académicien Amin Maalouf – librettiste et collaborateur – met à l’honneur la femme, où pardon, paix, maternité, protection, s’opposent métaphoriquement au masculin, méprisant, violent, violeur, hypocrite et destructeur, dans un monde où l’homme est synonyme de guerre par métonymie, guerre qu’Adriana refuse de faire entrer à sa porte de même que le soldat Tsargo, vainquant finalement la résistance d’Adriana qui en tombera enceinte. 

L’histoire portée par l’œuvre lyrique, précisément composée par une femme d’exception dans un monde d’hommes, regorge d’une polysémie féminine, particulièrement aujourd’hui où la femme est en pleine lutte de ses droits, contre des mœurs séculaires. Ainsi l’héroïne dit-elle à sa sœur :

 

Non, Refka, ce n’est pas le mépris que tu viens de décrire,

C’est la peur déguisée,

La peur apprise aux femmes depuis Ève.[1]

 

  Mais selon l’artiste, c’est avant tout l’histoire d’une expérience de la maternité :

 

  Deux coeurs qui battent dans le corps d’une femme enceinte, je suis fascinée par l’idée de cette relation secrète entre une mère et son enfant à naître. [2]

 

  Deux cœurs oeuvrent de concert, celui d’Adriana et de son fils Yonas, qui en abandonnant son projet impétueux de vengeance contre son père apporte finalement une promesse de salut. Cette histoire lyrique transmet le message d’une morale exemplaire à l’auditeur d’aujourd’hui, qui évolue dans un monde où l’humanisme est blessé par des guerres sans fin et des violences omniprésentes.

Parisienne depuis 1982, après avoir étudié à la prestigieuse Académie Sibelius d’Helsinki, Saariaho s’inscrit à l’IRCAM pour perfectionner ses connaissances en acoustique et traitements électroniques du son. Fidèle à sa vision musicale aux tendances spectrales, Adriana Mater s’écoule en un flux sonore dont les flots turbulents font rebondir les gouttes de la complexité microtonale.

L’ouverture sur les percussions, qui scandent le mauvais augure du deuxième tableau, emporte l’auditeur sur les vagues du chaos de la guerre et préfigure le crime du viol par le soldat Tsargo. Dans un onirisme poreux entre réel cauchemardesque et mauvais rêve, l’académicien Amin Maalouf – librettiste et collaborateur – met à l’honneur la femme, où pardon, paix, maternité, protection, s’opposent métaphoriquement au masculin, méprisant, violent, violeur, hypocrite et destructeur, dans un monde où l’homme est synonyme de guerre par métonymie, guerre qu’Adriana refuse de faire entrer à sa porte de même que le soldat Tsargo, vainquant finalement la résistance d’Adriana qui en tombera enceinte.

L’histoire portée par l’œuvre lyrique, précisément composée par une femme d’exception dans un monde d’hommes, regorge d’une polysémie féminine, particulièrement aujourd’hui où la femme est en pleine lutte de ses droits, contre des mœurs séculaires. Ainsi l’héroïne dit-elle à sa sœur :

 

Non, Refka, ce n’est pas le mépris que tu viens de décrire,

C’est la peur déguisée,

La peur apprise aux femmes depuis Ève.[1]

 

Mais selon l’artiste, c’est avant tout l’histoire d’une expérience de la maternité :

 

Deux coeurs qui battent dans le corps d’une femme enceinte, je suis fascinée par l’idée de cette relation secrète entre une mère et son enfant à naître. [2]

 

Deux cœurs oeuvrent de concert, celui d’Adriana et de son fils Yonas, qui en abandonnant son projet impétueux de vengeance contre son père apporte finalement une promesse de salut. Cette histoire lyrique transmet le message d’une morale exemplaire à l’auditeur d’aujourd’hui, qui évolue dans un monde où l’humanisme est blessé par des guerres sans fin et des violences omniprésentes.

[1] Voir Amin Maalouf, Adriana Mater, Le Livre de Poche, Grasset, 17 septembre 2008

[2] Propos de Kaija Saariaho rapportés par Jean-Yves Larrouturou dans l’émission « Splendeurs et saisissements : la musique de Kaija Saariaho », « Mazette ! Quelle musique ! » du 9 octobre 2022, France musique https://www.radiofrance.fr/francemusique/podcasts/mazette-quelle-musique/splendeurs-et-saisissements-la-musique-de-kaija-saariaho-4037309

Voir aussi

Le documentaire The Birth of Adriana Mater, Per Nygren, Anna-Kaarina Kiviniemi, Yle, 2006 https://www.youtube.com/watch?v=dJHAnRUZens

Le site Deutsche Grammophon https://store.deutschegrammophon.com/en/products/esa-pekka-salonen-saariaho-adriana-mater

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